CONSTANCE et PATIENCE: les cloches de chez nous.

Blanquer
Blanquer

le 20/02/2008 à 18:51

Le soleil brille depuis plusieurs jours dans le ciel lumineux de Paris. La rareté du fait mérite d'être soulignée car ici le ciel se confond habituellement avec la couleur du bitume et en le rejoignant, efface les limites naturelles qui les séparent.

Donc, récemment, par un après-midi particulièrement ensoleillé, je faisais au pas de Sénateur -un pas que j'observe d'ailleurs de plus en plus court et de moins en moins rapide- (mais passons) ma petite (voilà encore un adjectif restrictif) promenade quotidienne dans les environs de mon quartier. Tête baissée afin d'éviter les étrons qui parsèment les trottoirs parisiens (en tout cas c'est un conseil que je donne aux touristes qui débarquent à Paris: toujours regarder où l'on pose ses pieds, même s'ils sont déjà noirs), mes pas me menèrent rue St Dominique où le soleil, encore lui, éclaboussait la façade ocre de l'église St Pierre du Gros Caillou.
Me souvenant pour l'avoir récemment lu que cette paroisse avait accueilli les cloches venues involontairement de chez nous, je décidai de me renseigner à leur sujet et pénétrai dans la pénombre rassurante de l'église où le bedeau s'activait à ses tâches.

M'approchant précautionneusement de lui, je me présentai et lui demandai s'il était possible de photographier les cloches. Ma requête ne l'étonna point et il me répondit aimablement un léger sourire aux lèvres, que les visites du clocher étaient pour des raisons de sécurité totalement interdites, mais il sut immédiatement d'où je venais. Serait-ce à mon accent insuffisamment pointu (mais le sera-t-il un jour?) qu'il décela dès ma première phrase, que j'appartenais à un clan dont beaucoup de membres m'avaient précédé sur ce coup? Toujours est-il que ne lâchant pas prise, je le questionnai sur les fameuses cloches et de tchatche en papotage, je reconstituai l'histoire de ces dernière depuis leur venue involontaire en Métropole

Suite à l'indépendance de l'Algérie, plusieurs cloches d'églises sont rapatriées en Métropole et attribuées aux paroisses qui en manquent
A cette occasion, l'église St Pierre du Gros Caillou en reçoit deux mais ne peut les installer faute de clocher suffisamment vaste.
La ville de Paris propriétaire du bâtiment, donne son accord pour la réalisation d'un véritable beffroi, mais les crédits manquent.
Grâce à la ténacité conjuguée de M Edouard Frédéric-Dupont Maire du 7ème arrondissement de Paris et du père de Vial curé de la paroisse, les crédits sont enfin votés et les travaux démarrent en octobre 1992. Ils vont durer jusqu'au mois de mai 1993.
Le clocher d'origine est retiré et remplacé par le campanile actuel conçu par l'architecte Jantzen, architecte en Chef des Monuments Historiques.

Si la cloche provenant de l'église Ste Monique du Ruisseau sonne un La 3 parfait, l'autre cloche provenant de Notre-Dame d'Afrique, donne un son défectueux et doit être refondue.

Les quatre cloches installées dans le nouveau clocher sont:

CLEMENCE:
- Fa 3 (bourdon).
- Poids: 800 kg.
- La devise de Clémence est: Amat oratorio curam.

CONSTANCE: C'est la notre; celle du Ruisseau qui s'appelait alors: Marthe - Elisabeth.
- Fondue en 1939.
- La 3.
- Poids: 445 kg.
La devise de Constance est: Adérit tempus "veillez et priez car vous ne savez ni le jour ni l'heure". Devise qui nous rappelle que le temps viendra et que chacun doit se tenir continuellement prêt.

PATIENCE:
C'est la cloche de Notre-Dame d'Afrique, refondue, elle, en 1993.
- Si b3.
- Poids 340 kg.
La devise de cette cloche est: Percussa élevor
"Quand j'ai été frappée, je m'élève"

PRUDENCE:
Do 4.
Poids 275 kg.
La devise de cette cloche est: Magna parvis.

Voilà! Je ne suis pas spécialiste des cloche et je vous vends l'histoire au prix où je l'ai achetée.

professeur
professeur

le 22/02/2008 à 22:34

C'est avec beaucoup de "Prudence" que notre promeneur parisien nous livre son son de cloche. Il lui aura fallu une"Patience" à toute épreuve dans ce concert de carillons, pour nous conter merveilleusement les péripéties de Marthe-Elisabeth. Pour d'aucuns d'entre nous qui avons dû déménager à la cloche de bois, il y a de quoi nous donner le bourdon.
Nous lui accorderons toutefois notre "Clémence" et nous suivrons avec "Constance" ses nouvelles exraordinaires.
Yves CHARDON
Yves CHARDON

le 26/02/2008 à 14:36

eh be Professeur ! Qu'en termes choisis ceci est bien dit.Bravo et merci.
professeur
professeur

le 06/03/2008 à 19:38

Yves, tout le mérite revient à "La Gentille" Evelyne qui a retrouvé la trace de Marthe- Elisabeth et à Blanquer "promeneur du dimanche" qui a su nous raconter son histoire. Merci à eux et à toi.Bien amicalement
Blanquer
Blanquer

le 07/03/2008 à 20:10


Bonsoir.

C'est effectivement grâce à "La Gentille" Evelyne et à Antoine le pêcheur, que j'ai pu me rendre à Saint Pierre du Gros Caillou.
yves CHARDON
yves CHARDON

le 09/03/2008 à 12:00

Alors merci a vous tous,j'essaierai lors d'une visite a PARIS de revoir nos cloches.Amitiés a vous tous,et continuyez............
professeur
professeur

le 21/03/2008 à 15:14

En ce temps là, les congés scolaires incluaient Pâques, la fête chrétienne commémorant la résurectionde Jésus -Christ. Aussi,n'attendions-nous pas dans le quartier le retour de Marthe Elisabeth. Nous en profitions pour changer d'air en .rendant visite à nos oncles et tantes.
Dans le village de notre mère, les rites liturgiques étaient respectés et commençaient par la messe du jeudi-saint au soir, en mémoire de la dernière Cène. Le vendredi-saint le jeûne pascal était observé et, l'après-midi, était célébrée la Passion du Seigneur(mort de Jésus-Christ). Le soir débutait l'adoration des quarante heures, cet enchainement de prières jusqu'au dimanche.Le jour de Pâques.l'église était pleine. A la fin de l'office les cloches sonnaient à la volée et nous étions pressés de rentrer pour courir dans le jardin de nos tantes; la chasse aux oeufs était ouverte. Dans les cornets des arums, dans les massifs de fleurs multicolores, il y en avait des rouges teintés dans une décoction de betterave, des verts trempés dans un jus d'épinards, des jaunes cuits dans une infusion de thé et cela suffisait à notre bonheur.
Ainsi,Nous pouvions patienter jusqu'à l'heure du repas où le dessert nous interessait par dessus tout. Immanquablement, le menu se terminait par une délicieuse île flottante (des oeufs à la neige, disions-nous) accompagnée de la traditionnelle Mouna dont nous allions faire une cure pendant la semaine de Pâques.
Joyeuses Pâques à tous.

Sylvette BENEJEAN
Sylvette BENEJEAN

le 24/08/2008 à 15:46

Un grand merci à Evelyne et à Blanquer de nous avoir si bien raconté cette belle découverte à l'Eglise St Pierre du gros caillou... Je me trouvai sur Paris en 2007 mais n'était pas au courant de cette histoire. Bravo. Amitiés ruisséennes. Sylvette -

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